mardi 25 octobre 2016

Tokyo Vice

Jake Adelstein
Editions Marchialy
EAN : 9791095582007

sorti le 4 février 2016
langue française
475 pages


COUP DE CŒUR !

Résumé : Quand Jake Adelstein intègre en 1993 le service Police-Justice du plus grand quotidien japonais, le Yomiuri Shinbun, il n'a que 24 ans et il est loin de maîtriser les codes de ce pays bien différent de son Missouri natal. A Tokyo, il couvre en étroite collaboration avec la police les affaires liées à la prostitution et au crime organisé. Pour cela,il n'hésite pas à s'enfoncer dans les quartiers rouges de la capitale, dans les entrailles du vice et de la décadence. Approché par les yakuzas, il devient leur interlocuteur favori tout en restant un informateur précieux pour la police. Une position dangereuse, inédite et ambivalente, aux frontières du crime, qui incite Jake Adelstein à entrer dans un jeu dont il ne maîtrise pas les règles.

Mon avis : J'aurais beaucoup trop de choses à dire sur ce livre, je vais donc essayer d'être concise et de ne pas vous gâcher la surprise qu'il peut vous amener. Avant toute chose, je tiens à souligner le travail remarquable fourni par les Editions Marchialy qui ont fait de ce livre, leur première publication, un véritable objet d'art que ce soit avec leur couverture underground ou leur mise en page originale et moderne.
Pour en venir au texte en lui-même, Jake Adelstein nous fait découvrir un côté du Japon plutôt sombre et méconnu. Avec son style dynamique, quelques jeux de mots et beaucoup d'humour, on embarque pour un pays et une culture totalement différents. On suit les difficultés de l'auteur, on apprend avec lui ces mœurs, ces hiérarchies, ces relations entre l'amitié et le purement professionnel. La richesse de ce livre est d'ailleurs, sans aucun doute, son côté humain ; les personnes que l'on nous présente sont hautes-en-couleur, parfois très attachantes comme c'est le cas pour la famille Sekiguchi. Même lors de ses enquêtes sur la prostitution, Jake Adelstein met en valeur les personnalités, les témoignages, plutôt que des faits durs. En lisant ce livre poignant, la difficulté est de toujours se rappeler que ce sont bien des événements réels et non pas un roman. 
Le contenu est lui aussi très intéressant ; on trouve, par de petites remarques pleines d'humour, le ressenti de l'auteur face à son statut de gaijin, d'étranger. On suit ses enquêtes sur le crime organisé, qui traitent du meurtre en série jusqu'au trafic d'êtres humains en passant par beaucoup d'autres crimes et délits. Il pointe grâce à cet ouvrage quelques uns des problèmes du Japon, que ce soit au niveau national ou international ; l'affaire principale qu'il relate concerne une organisation de yakuzas, le Yamaguchi-gumi, dont les conséquences affectent la hiérarchie interne de l'organisation, le Japon mais aussi plusieurs pays étrangers.

En bref : Tokyo Vice est un livre que l'on dévore du début à la fin. Entre le journalisme et le polar mafieux, il est très facile d'accès. Et la personnalité de son auteur ressort énormément dans tout ce texte ; l'écriture, les remarque, l'axe emprunté pour raconter les enquêtes. Je ne peux que le conseiller à quiconque s'intéresse un peu au Japon !




"Parfois, mieux vaut avoir de la chance que d'être bon"
Tokyo Vice

samedi 8 octobre 2016

The bone clocks

David Mitchell
Editions Sceptres
EAN : 9780340921623

sorti le 18 juin 2015
langue anglaise
626 pages



Résumé : The bone clocks conte la vie de Holly Sykes, une vie qui peut paraître ordinaire, mais ponctuée d'éclairs de précognition et de visites de personnes étranges semblant provenir de brèches dans les lois de la réalité. Car Holly Sykes est également un acteur involontaire dans une sanglante querelle jouée dans l'ombre et dans les marges de notre monde, et elle peut s'avérer être son arme décisive.



Mon avis : Le livre est divisé en 6 parties, chacune racontée par un narrateur différent mais qui ont pour dénominateur commun de faire découvrir des passages de la vie de Holly. Tout d'abord, j'avais du mal à en voir l'utilité, mais finalement je me suis rendue compte que tous les personnages apportent quelque chose d'important à l'histoire et le changement de point de vue installe un certain suspense. De même, la compréhension de l'aspect fantastique, essentiellement tourné autour de la mort, évolue tout au long du roman, l'enjeu n'est vraiment compréhensible que dans la cinquième partie. Absolument pas prévisible ou cliché, ce scénario est une petite merveille.

De même pour les personnages, en particulier les narrateurs, on ressent l'effet que Holly a eu sur leur vie ; d'abord antipathiques, présentés par leurs défauts, on s'attache à eux progressivement, ou l'inverse... Et les personnages qui peuvent paraître les plus insignifiants se révèlent en fait être les plus importants. Par contre, le style de David Mitchell est assez dur à suivre, l'auteur nous balade dans l'espace et le temps, et le fait que ça soit en anglais ne m'a pas forcément aidée (ce livre devrait cependant bientôt sortir en France), ce qui n'empêche pas que The bone clocks soit un livre marquant, avec des réflexions sur notre monde et notre façon d'agir et que David Mitchell mérite son statut d'écrivain talentueux et original.

En bref, une histoire compliquée à expliquer mais fascinante et originale.





"You only value something if you know it'll end."
                                                The bone clocks

En route pour la gloire

Robert Heinlein
Folio SF
EAN : 9782070320547

sorti le 18 mai 2006
langue française
457 pages


Résumé : Je n'étais pas très chaud pour partir en colonie de vacances dans le Sud-Est asiatique, mais on ne m'avait pas donné le choix. Enfin, à mon retour, j'avais une belle cicatrice toute neuve sur la figure et un billet de Sweepstake gagnant dans la poche grâce auquel j'ai rencontré la plus belle sorcière des Vingt Univers. C'est là que mes ennuis ont commencé : je me suis retrouvé dans un monde parallèle, à pourchasser des rats gros comme des loups, des dragons cracheurs de feu (évidemment), et même un Ogre, tout en essayant d'échapper aux Fantômes à Longues Cornes et autres Écumeurs des Eaux Glacées. Sans compter Celui-Qui-N'a-Jamais-Vu-Le-Jour et Celui-Qui-Dévore-les-Âmes. Et tout ça pour récupérer un Oeuf de Phénix... 
Vous allez dire que je ne suis jamais content, mais vous ne croyez pas qu'il y a de quoi vous faire regretter votre bonne vieille Terre, Sud-Est asiatique ou pas ? Et encore, je ne vous raconte pas tout !

Mon avis : Comme le laisse deviner le résumé, l'histoire ce passe dans des lieux enchanteurs, et suit un scénario de fantasy classique empli de créatures fantastiques. Cependant Heinlein explique tous ces codes grâce à la science, ce qui fait d'En route pour la Gloire un livre pour le moins original et intéressant.
Le récit est rapporté à travers les yeux du personnage principal, Oscar, l'écriture, assez ironique par moment, est très plaisante même si j'ai trouvé quelques passages un peu lourds. Malgré tout, j'ai eu du mal pendant la grande majorité du livre avec les deux personnages les plus importants, par leurs personnalités et leurs relations ; le fait qu'Oscar suive les ordres sans poser de questions (une image du militaire peut-être ? ), imagine des stratégies sans même savoir le "pourquoi" de sa quête m'a beaucoup dérangé. Il en va de même pour le personnage féminin, on voit Star par le regard d'Oscar, sexualisée au plus haut point et qui semble de plus en plus soumise tandis que l'on avance dans le récit. Ces éléments, ainsi que les premiers chapitres et la citation de début de livre, me font penser qu'en fait Heinlein est désabusé sur la société à laquelle il appartient et qu'il se sert de son livre pour en faire la critique, néanmoins sa vision de la France, pays qu'il a pourtant l'air d'apprécier, est remplie des clichés anti-français typique des États-Unis... Je dirais donc que ce livre m'a surtout troublée, que je l'ai parcouru sans jamais être sûre de vraiment comprendre ce que voulait transmettre l'auteur.
Toutefois, le concept m'ayant beaucoup attiré et la narration étant plutôt agréable, j'ai lu ce livre très vite. Et les derniers chapitres dans lesquels Oscar fait son introspection m'ont un peu réconciliée avec les personnages, le narrateur ayant grandi et, à l'aide de Rufo (un personnage que j'ai en somme bien aimé), ayant changé de point de vue sur ce qui l'entoure (la société comme ses proches).

En bref, un style agréable et un concept intéressant mais un manque de clarté et de légèreté dans les critiques.




"Les héros ne sont pas censés parler,c'est évident, puisque, chaque fois que j'ouvrais la bouche, on me fourrait quelque chose dedans."
En route pour la gloire

The Buried Giant

Kazuo Ishiguro
Faber&Faber
EAN : 9780571315079

sorti le 28 janvier 2016
langue anglaise
362 pages


Résumé : Axl et Beatrice vivent un amour constant qui a résisté aux années. Ils décident de faire un voyage pour rejoindre leur fils, parti depuis longtemps. De nombreux obstacles se dressent sur leur chemin, parfois étranges, parfois terrifiants, et mettent leur amour à l'épreuve. Leur parcours est une métaphore de nos vies à tous.

Mon avis : The Buried Giant fait partie de ces livres envoûtants, qu'on est incapable de fermer une fois qu'on l'a commencé et qui reste ancré dans nos têtes pendant longtemps. Par son univers poétique, empli de créatures merveilleuses, Kazuo Ishiguro nous fait réfléchir ; doit-on sortir de cette brume qui nous vole nos souvenirs ? Ce qu'on risque de découvrir de notre passé ne serait-il pas trop lourd à supporter ? Et en plus des métaphores, cette épaisse brume, présente tout au long du livre permet de donner une atmosphère à la fois pesante et confuse, qui se marie très bien avec l'Angleterre de légendes du temps arthurien.
Le parcours de notre vieux couple les mènera à se redécouvrir eux-même ainsi qu'à apprendre grâce à leurs rencontres des thèmes bien humains ; la confiance et la haine, la vengeance et la justice... Bien que je ne sois pas une grande amoureuse de romance, leur histoire m'a touchée par la tendresse débordante que l'on ressent entre eux.

En bref, poétique, envoûtant, "The Buried Giant" est un texte marquant, débordant de sensualité, de respect, de pudeur, le tout dans un univers de légendes inoubliable.





"Promise to keep what you feel for me this moment always in your heart, no matter what you see once the mist's gone."
The Buried Giant

dimanche 2 octobre 2016

Le Citron

Kajii Motojirô
Editions Philippe Picquier
EAN : 9782809709940

sorti le 7 mars 2014
langue française
125 pages


COUP DE CŒUR !

Résumé : "Pour tout dire, j'aime les citrons. J'aime leur couleur pure, comme celle de la peinture." Il y a une connivence immédiate entre Kajii et les choses. Regarder est pour lui "la seule manière vivante de vivre". Caresses, Sous les cerisiers, Le Citron... : l'écriture est d'abord sensorielle et la notation des sensations les plus fines, des moindres scintillements des objets animés et contemplés, nous convie à de nouvelles correspondances, à un rêverie dispensatrice d'émotion et de réconfort. Savon, crayons, bruit d'eau dans la forêt, grenouilles ou citron, les traces minuscules de la vie quotidienne révèlent leur beauté, leur monde secret à celui qui, les regardant de façon désintéressée, les nomme pour elles-même.

Mon avis : Pour bien comprendre ce recueil de nouvelles qu'est Le Citron, il est indispensable d'avoir quelques informations sur son auteur. Kajii Motojirô est né en 1901 et est atteint de tuberculose en 1917, la maladie, dont il mourra en 1932, va influencer sa vision du monde et de la vie. Ces aspects se retrouvent dans son recueil.
Composé de huit nouvelles, de longueurs inégales, l'originalité de ce petit livre réside dans cette vision de la vie à laquelle il nous invite. D'une écriture poétique, très axée sur les sens, Kajii nous emporte dans les corps de malades, se débattant entre des périodes lugubres d'ennui et de dépression et des instants de bonheur inattendus. Le livre ne contient pas vraiment d'action, il met en avant les sentiments, les sensations, grâce à des objets du quotidien et un style splendide, qui me rappelle par moment celui de Baudelaire. Le lecteur se retrouve dans une atmosphère de bulle, les sens exacerbés, à ressentir toutes ces émotions provoquées par la maladie, avec une intensité et une poésie que seul Kajii Motojirô pouvait nous offrir. Une histoire de partage et d'émotions.

En bref, un livre à vivre plutôt qu'à lire.




"Sous les cerisiers sont enterrés des cadavres ! Il faut s'en persuader. Sinon, n'est-il pas incroyable que les cerisiers fleurissent si splendidement ?"
Le Citron